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Polar, noir et blanc

Un blogue qui parle de livres, de bons livres, dans tous les genres, juste pour le plaisir de lire et d'en parler.

L’étoile jaune de l’inspecteur Sadorski

En 2011, Romain Slocombe publiait «Monsieur le commandant», une lettre qu’un haut gradé de l’armée nazi écrivait à son commandant, nous révélant, un personnage affreux, infect, impitoyable, ayant autant de conscience qu’une pierre du mur de Berlin.

 

En 2016, ce même auteur nous présentait un autre personnage tout aussi effrayant dans un premier tome, « L’affaire Léon Sadorski ». Personnage encore plus terrifiant, cette fois-ci, un Français, membre de la police nationale, collaborant avec l’armée allemande dans la poursuite et l’élimination des Juifs. Ce premier roman nous faisait rencontrer ce personnage, de ceux que l’on aime détester et qui nous fascine tellement, que l’on veut voir jusqu’où ils vont aller.

 

 

« L’affaire Léon Sadorski» nous trempait dans une atmosphère de collaboration, de traitrise, de méfiance, de dénonciation et d’avidité perfide. "L’étoile jaune de l’inspecteur Sadorski" nous plonge un peu plus profondément dans cette mer polluée à la sauce polluante nazie. Romain Slocombe nous décrit parfaitement le climat régnant dans la France occupée sans jamais tomber dans le didactisme ou la description de ses recherches historiques.

 

L’inspecteur Sadorski, se définissant comme un vrai patriote, se voit confier les enquêtes sur l’attentat à la bombe dans un café près du Palais de Justice et sur le meurtre d’une jeune fille dont le corps a été découvert en banlieue parisienne. Malgré le fait qu’une majorité de personnes haïssent ce très « bon enquêteur », il se débrouille très bien dans les arcanes du pouvoir français et allemand. Comme une véritable couleuvre glissant dans tous les recoins où les Juifs pourraient se cacher. Car, dans les brigades spéciales, la poursuite des étoiles jaunes est sa principale mission. Sauf évidemment pour la jeune Julie Odwak, une jeune étudiante juive qu’il convoite secrètement.

 

En même temps, dans les officines nazies, se prépare le tristement célèbre Vél d’Hiv, cette horrible rafle, bestiale, de dizaines de milliers de Juifs. Sadorski y participera. Et nous, nous y assisterons avec horreur par l’entremise de ses yeux, de son immoralité et de son antisémitisme crasse.

 

Si le personnage de Sadorski était infâme dans le premier volet de cette saga, dans ce deuxième opus, il réussit à se dépasser. Ses complices le surnomment même « le bouffeur de Juifs ».

 

Romain Slocombe nous décrit parfaitement cette époque que nous ne devrions pas oublier. Parfaitement documentés ces deux romans se révèlent passionnants malgré leur thématique. Une écriture fluide, des textes criant de vérités, des personnages complexes que l’on aime détester, un style fouillé, documenté, tout se met en place pour le lecteur curieux. Sans concession, l’auteur décrit l’atmosphère angoissant de ce Paris occupé et géré par des collaborateurs aussi ignobles que les nazis. Romain Slocombe nous fait vivre tout le spectre d’émotions, grâce à son immense talent de raconteur.

 

Si vous n’avez pas lu le premier tome de ce récit, n’hésitez pas à vous lancer dans cette histoire. À mon avis, pour apprécier ce deuxième roman, il faut avoir lu le premier. Quelle chance, il a été publié en livre de poche, dans la collection Points.

 

Un extrait qui résume bien le personnage :

 

"Sadorski est un catholique, peut-être pas très pratiquant, mais tout de même. La religion apporte au fonctionnaire une forme de sauvegarde psychologique, à lui que ses collègues soupçonnent quelques fois d'avoir "une case en moins": les accès de rage pour des motifs futiles ou incompréhensibles, les hurlements devant les inspecteurs et les stagiaires terrifiés, les gifles, les buvards jetés contre les murs, la détestation farouche, obstinée, des fils d'Israël. Le caïd de la 3e section, le bouffeur de Juifs." 

 

Bonne lecture !

 

L’étoile jaune de l’inspecteur Sadorski

Romain Slocombe

La bête noire

Robert Laffont

2017

567 pages

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