12 Juin 2010
Tiens, ce matin, nous allons parler un peu théâtre!
Hier soir, j'ai assisté à la pièce "Le Dragon bleu", écrite et réalisée par Robert Lepage, Marie Michaud ayant également participé à l'écriture de la pièce.
Tout d'abord, je ne savais pas du tout à quoi m'attendre d'une pièce de théâtre de Robert Lepage;
je n'avais qu'assisté au grandiose spectacle du 400e anniversaire de la ville de Québec, projeté dans le Vieux Port.
Un peu fébrile, au début, je jette un regard sur les spectateurs: salle hétérogène ... Des gens de tous âges ...
Même des ados excités !!! Plus de cheveux bruns que de têtes grises !!!
1er élément, le rideau ... Un genre de rideau de métal, divisé en 8 parties qui semblent amovibles: décor austère,
presque industriel ... Bizarre !
Tout à coup, Lorraine Pintal nous avertit, avec beaucoup d'humour d'éteindre nos cellulaires, et la salle s'obscurcit !!!
Et l'explosion commence ... tout doucement !!!!
Henri Chassé, sur un petit papier de soie posé par terre, nous donne un petit cours sur les idéogrammes chinois ... ce qu'il écrit, est reproduit sur les 8 portes du rideau ... Le moment de
découverte est fascinant, cette poésie met la table pour ce qui va suivre !!!!
Et soudain, ça part: la pièce prend son envol et dans une suite de tableaux, extraordinairement esthétiques, le génie
de Robert Lepage s'exprime et les textes de Marie Michaud (et de Lepage) nous envoutent et parfois nous font rigoler.
La mise en scène est complétement éclatée; Robert Lepage utilise tout l'espace d'une façon créative et
en utilisant tous les moyens pour développer la beauté du visuel de la pièce. Les tableaux se succèdent dans une
suite de couleurs et d'effets spéciaux.
Un moment, on se retrouve en avion au milieu d'un orage, à l'autre sur le bord du Yang-Tsé-Kiang à regarder passer un
bateau et tout à coup, un train de passagers traverse la scène, petit, minuscule, un train jouet ... mais on y croit !!!
Et, plus bucolique, deux comédiennes se promènent à vélo !!!!
Tiens, voici, je vous présente des extraits, juste pour vous faire saliver:
http://www.youtube.com/watch?v=hYpC0aYe9ro
L'histoire est relativement simple: un triangle amoureux un peu particulier.
Trois artistes qui ont pris des chemins différents: Robert Lamontagne s'est exilé en Chine pour fuir
une vie québécoise trop exigeante pour lui. Il est propriétaire d'une petite galerie.
Claire Forêt (une ancienne flamme) se rend chez lui pour aller adopter une petite asiatique: elle a quitté la
peinture pour se lancer dans la publicité où elle a réussi !!!
Xiao Ling est une jeune peintre chinoise, amante de Lamontagne, qui lui organise son prochain vernissage.
Et là, dans un chassé-croisé poétique, les personnages vivront leurs émotions, découvriront leur vraie nature
et voyageront vers une conclusion tout à fait particulière ...Mise en scène: Robert Lepage nous propose trois conclusions, trois façons de terminer cette histoire. Il laisse le spectateur
choisir; lui, il propose ...
Et voilà ce qui va alimenter les discussions à la sortie du théâtre ...
La pièce est jouée en trois langues: en français, en anglais et en chinois. Un ingénieux processus de sous-titrage
nous permet de tout comprendre, sans difficulté.
Le décor est fascinant, autant dans son ingéniosité, ses couleurs que dans sa polyvalence. Tour à tour, l'appartement
de Lamontagne devient une gare, un aéroport, une carlingue d'avion, une galerie d'art, un fleuve, etc.
On se laisse charmer par la beauté visuelle et poétique de la scène, matériau exceptionnel où Lepage réinvente le théâtre du XXIe siécle.
Le jeu des comédiens est extraordinaire. Henri Chassé est à l'aise dans les trois langues et son expérience de comédien
transcende la pièce.
Tai Wei Foo apporte à la pièce une dimension particulière: elle ne parle que le chinois mais elle prend une place importante
dans notre réflexion. Et les moments où elle danse sont carrément envoûtants !!!
Mais, selon moi, la révélation, c'est Marie Michaud. sa participation à l'écriture des textes y est sûrement pour quelque chose,mais elle a toute une présence sur scène, son personnage développe
tout un charisme. Elle passe du dramatique à l'humour avec une présence déconcertante, elle joue avec les émotions du spectateur avec un brio qui nous enveloppe !!!
En bref, j'ai passé une excellente soirée.
Et je nous souhaite d'autres productions aussi géniales qui feront que la dramaturgie québécoise continuera à se développer. Et de Michel Tremblay en passant par Wajdi Mouawad et Robert Lepage,
nous avons la chance de visiter des créateurs de génie qui savent réinventer les genres. Et en plus, cette expression dramatique est exportable: le succès de Mouawad, cet été, à Avignon, nous le
confirme.