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Polar, noir et blanc

Un blogue qui parle de livres, de bons livres, dans tous les genres, juste pour le plaisir de lire et d'en parler.

J'entends le bruit des ailes qui tombent de Gipsy Paladini

J'entends le bruit des ailes qui tombent de Gipsy Paladini

« J’entends le bruit des ailes qui tombent » de Gipsy Paladini. Voici le genre de romans qui ne laissent personne indifférent.

Je viens de le lire une deuxième fois, car j’ai eu la chance d’être parmi les premiers lecteurs, de le lire dans sa première version.

Alors, partisan de l’objectivité (ça existe ? Les partisans, oui … mais l’objectivité ?) à tout prix, passez votre chemin, cette chronique est teintée de subjectivité, mais elle vient directement de mes ressentis de lecteur.

Ce roman vous frappe en plein visage. Sans concession. Avec émotions.

Une traversée houleuse, sous un ciel gris, presque noir, en sachant que derrière cette couverture nuageuse, le soleil brille et tente de percer ce mur opaque.

Vous plongez dans la noirceur et vous vous y enfoncez, en même temps que ses personnages. Puis, vous remontez à la surface, en respirant à grands coups d’espoir en l’humain.

Vous flottez dans une mer d’actions et de rebondissements, quelques vagues de violence vous assaillent. Décontenancé, en plein coeur d’une tempête de tendresse, vous êtes emporté par un tsunami d’amour.

Vous naviguerez avec des personnages, parfois cruels, souvent blessés, mais toujours baignés dans une humanité à fleur de peau. Pas question de passagers clandestins, chaque personne souffre, mais aussi, tout le monde jouit.

Puis, quand vous aurez échoué sur une île, terminant votre lecture, assis sur le sable chaud, vous ne pourrez faire autrement que de vous dire : « J’entends le bruit des ailes qui tombent. » Voilà le voyage auquel vous convie Gipsy Paladini.

Al Seriani est immergé dans son bain. L’eau chaude rougit de plus en plus, sa vie s’envole avec le sang qui sort des entailles qu’il s’est faites au poignet. Il en a assez. La vie n’a plus de sens, seul au milieu des 15 millions de New-Yorkais. Sa carrière de policier est foutue, sa paternité reniée. Et ses amours sont à l’avenant, improbables et impossibles.

Le téléphone sonne ! Ce sera son dernier contact avec le monde des vivants … Perdant de plus en plus conscience, sentant la vie s’échapper de son corps, il décroche.

Et s’accroche !

New-York, à la fin des années soixante, n’est pas une ville paisible, mais plutôt un endroit dangereux dans certains quartiers. Al Seriani fréquente les plus noirs, entouré de prostitués, de voleurs à la petite semaine et de meurtriers. Son monde, ce sont les bars suspects, les ruelles infestées par la vermine animale et humaine et les bordels infects peuplés de putains sur le retour.

Il reprend donc du service afin de résoudre une série de meurtres touchant des enfants, à la recherche de cet être infâme ayant un penchant pour la mise en scène. Les assassinats sont crapuleux et les scènes de crime sont macabres et théâtrales.

L’enquête est fascinante et le suspense est haletant. Le lecteur participe à cette descente aux enfers ; on devient plus que spectateur … Le récit s’adresse directement à nos émotions et à nos tripes. Le cœur abimé de la Grosse Pomme bat au rythme de la violence, ses ruelles sont les veines où le sang coule. Al enquête dans la tourmente, tout en combattant ses propres démons et utilisant ses outils plus ou moins orthodoxes pour résoudre l’énigme.

Il faut avouer que ce policier, imaginé par l’auteure, n’est pas un personnage très sympathique. Buveur, violent, caractériel, rongé par la culpabilité, toujours à la limite de l’immoral et de l’illégal, Paladini réussit à nous le faire aimer, même si parfois, on traverse le chemin de la pitié pour arriver le comprendre. Ses questionnements, ses humeurs, ses doutes, il les partage avec un prêtre, sur les bancs d’une église où il se réfugie. Du bordel à l’église, en passant par le bar sordide, Al traine son mal de vivre et semble, à certaines occasions, prendre plaisir à pourrir la vie des gens qui l’entourent. Amateurs de personnages complexes, nous sommes servis !

Gipsy Paladini est une auteure à découvrir, une écrivaine talentueuse, capable de vous émouvoir, de vous malmener et surtout, de vous charmer par ses phrases remplies de poésie urbaine et d’un sens de l’humour percutant. Elle sait écrire la violence, le noir, le glauque, mais elle est aussi habile à décrire les sentiments nobles, humains, le ciel bleu sans nuages.

Pour lire des extraits qui démontre le talent de l’auteure :

« Mais la mort ne se montrait toujours pas. Il voulait voir sa gueule pour pouvoir lui cracher dessus cette chienne qui avait emporté maints collègues, cette traîtresse qui se tapissait dans l’ombre, attendant un moment d’inattention pour envahir l’air de sa cape obscure et happer au passage les âmes qui s’offraient à elle. »

« Un enfant est une partie de notre passé oublié. »

« - Si tu continues à apparaître à chaque fois que je suis dans la merde, je vais finir par croire que t’es mon ange gardien.

- Si je devais être l’ange gardien de quelqu’un, je choisirais pas un gringo arrogant porté sur la bibine. »

« Ils avancèrent droit devant, le souffle court, s’efforçant d’ignorer les bruissements croissants qui provenaient de la forêt. Celle-ci s’éveillait lentement et suivait la progression de ces curieux visiteurs. Elle pouvait respirer leur odeur, caresser leurs cheveux et effacer leurs pas. Aucun d’eux n’osait se retourner de crainte de la voir se refermer sur eux. »

« Cinq heures plus tard, il se réveillait au milieu des klaxons et des odeurs de hot dog. Pour fêter ses retrouvailles avec la grosse pomme, Al s’était sniffé quelques rails de pollution et s’était enfilé un jus de chaussette aromatisé au caramel. »

Bonne lecture !

J’entends le bruit des ailes qui tombent

Gipsy Paladini

2015

468 pages

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A
Voilà une chronique qui m'a convaincu d'ouvrir ce roman.
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R
Et je pense que tu vas adorer !
V
Belle chronique ! Je l'ai dans ma liste des livres à lire, on en parle tellement et avec tant d'engouement ! Je suis curieuse de me faire mon propre avis.
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R
Vous m'en donnerez des nouvelles ! Bonne lecture !
B
Un livre que j'espère découvrir même en n'étant pas un des premiers lecteurs
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R
Bonne lecture ! Et surtout, bonne découverte ...