10 Novembre 2011
J’ai
amorcé ce "Roman-Réalité" avec beaucoup d’espoirs.
Je ne suis pas un adepte de télé-réalité mais je suis capable de reconnaitre qu’il existe un phénomène, que ce phénomène attire des centaines de
milliers de spectateurs et que socialement, il y a quelque chose qui se passe ... Ça va nous mener où ? Nul ne le sait. Est-ce que cette mode va passer ? Allez savoir !
Mais j’avoue que je salivais (attention aux mauvais jeux de mots et aux pensées lubriques !) en pensant à un traitement littéraire de ce phénomène
contemporain. Déjà la couverture du roman nous promettait une fellation littéraire; j’ai extrapolé en imaginant une orgie de style, un échangisme de phrases plus en plus percutantes, un
lupanar poétique marqué par une décoration sensuelle de l’image et de l’analogie, une bacchanale où je pourrais boire les paroles d’apprentis auteurs vitaminés à l’imagination et à la
créativité.
La 4e de couverture nous convie donc «à la plus grande aventure littéraire jamais réalisée au Québec.» Entrons donc avec un plaisir
anticipé dans cette aventure!
Christian Barré a l’excellente idée d’organiser un concours littéraire basé sur le principe des télé-réalité. Après un long processus de sélection,
quatre jeunes auteurs, inconnus, pleins de rêves, sont réunis dans un chalet isolé mais truffé de caméras, voyeuses et impertinentes, comme il se doit.
Leur consigne, écrire, chaque jour, un texte relatant les événements de la journée. Pour étoffer l’imaginaire, le concepteur organise
quotidiennement une activité quelconque qui apporte certains défis aux participants.
Un maître de jeux les observe. Julien Ponton, un écrivain avec un certain talent mais sans chance, se voit confier le mandat d’observer l’expérience
vécue par les quatre «acteurs de ce jeu» et d’apporter à chaque jour un commentaire sur ce que ces jeunes ont vécu et écrit.
L’objectif ultime: publier le premier roman-réalité de la planète !!! À chaque jour, les jeunes écrivent leur texte et le maître de jeux commente
les événements et les écrit dans un texte intitulé «La vraie histoire» !
Vous comprendrez l’enthousiasme que cette idée avait provoqué ! J’allais me régaler.
Et bien non !
J’avoue que l’idée de départ était excellente. On accroche très vite aux quatre personnages de futurs écrivains et on commence rapidement à
reconnaître leurs motivations, ce qui les pousse à agir et leurs préoccupations quotidiennes. Mais de littérature ... rien !
Dès les premières pages, le lecteur est envahi par le comportement d’adolescent de ces personnages: jalousie, regards en coin, superficialité,
sacres et anglicismes. Et ça continue, de chapitre en chapitre jusqu’au moment sublime où le sexe apparaît ... évidemment, il faut bien en mettre un peu !!!
Bref, je croyais vivre une expérience littéraire, je me suis malheureusement retrouvé avec un reportage factuel d’une véritable télé-réalité, écrite
par quatre jeunes avec un style d’adolescent. De la littérature, du style, de l’imagination, de la recherche, non, je n’en ai pas vu ! Et c’est là, l’aspect le plus décevant de ce
roman.
Je sais, je sais, vous me direz que ce genre d’émission de télévision attire des millions de téléspectateurs. Alors, je suis très content que les
téléspectateurs qui se délectent des histoires de «Loft story» et autres «Occupation double» puissent lire avec plaisir ce roman réalité qui répondra sûrement à leurs besoins. Et si ce roman est
une première porte d’entrée pour amener ces téléspectateurs à devenir des lecteurs et bien ce livre aura une certaine utilité.
Quant à moi, je pense que j’étais le mauvais lecteur pour ce roman.
Voici quelques extraits ...
«Ah, cibole ! Je suis encore FRU contre Élizabeth. Au moins, je vais dormir comme une souche. Comme une souche... drôle d’expression, quand
même.»
«Une relation construite à travers les sueurs froides des petites chicanes et les chaudes qui s’incrustent dans le lit.»
«Des fois, ça m’arrive de réfléchir.»
«Moi aussi, j’avais besoin d’une amie et, à mon grand bonheur, j’en ai trouvé une à 5% d’alcool. je l’ai frenchée au goulot avant d’aller me
coucher. Ça détend.»
Bonne lecture ... ?
Roman-Réalité
Dominic Bellavance
Coups de tête
2011
294 pages