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11 Octobre 2010
«Le livre des choses
perdues» n’est pas un grand roman. Même si je ne suis pas un grand lecteur de romans fantastiques (pourquoi dit-on «fantasy» ?), je ne dirais pas que ce bouquin répondra aux
attentes des amateurs du genre. Cependant, je peux affirmer que je me suis laissé accrocher aux plaisirs que l’auteur a ressentis, en écrivant cette fable et en triturant les contes de son
enfance. Je ne serai donc pas dithyrambique mais juste assez enthousiaste pour vous dire que j’ai apprécié cette lecture en le prenant comme un petit moment de détente littéraire.
John Connolly est un auteur de polars, de très bons polars. En bon Irlandais qu’il est, il adore ces histoires fantastiques, ces récits qui font peur mais surtout, ceux qui font appel à
l’imaginaire de l’auteur et à l’imagination du lecteur. Alors, quand j’ai vu ce roman, emballé, je m’y suis plongé avec un plaisir anticipé.
L’histoire commence dans une atmosphère dramatique, sous le ciel de Londres, attaqué par les avions allemands. David, un jeune garçon d’une douzaine d’années est au chevet de sa mère mourante; il
a développé une série de tics et de superstitions qui, pense-t-il, permettent à sa mère de survivre. Malgré ses efforts et pour son plus grand malheur, sa mère meurt et sa vie bascule. Son
père se remarie, tout ce beau monde déménage dans la maison de la dame et ... un petit frère arrive, petit être qui semble occulter définitivement l’image de sa mère. Les relations sont tendues
avec la belle-mère, le petit frère prend toute la place; dans la tête de David, le pire se laisse imaginer.
En même temps, il découvre dans sa nouvelle chambre, une bibliothèque qui appartenait, autrefois, au fils de la maison ... L’étrange Jonathan possédait des livres extraordinaires ... et David
«entend parler» ces livres qui l’obsèdent ... Qui est ce Jonathan qui un jour, a disparu avec sa petite soeur ? D’où lui vient cette nouvelle capacité à entendre ce que les livres ont à lui dire
... Une scène très drôle me revient à la mémoire ... Dans le cabinet du psychiatre, les livres, selon leur philosophie, approuvent ou désapprouvent ses gestes, ses paroles, ses opinions et
ses techniques. On imagine le fouillis d’idées et de points de vue !
Une nuit, une voix qui semble être celle de sa mère, l’attire vers un autre monde, un monde parallèle, dans lequel il vivra des aventures bien particulières, entouré d’un monde hostile, violent
mais aussi, accompagné par des personnages plus protecteurs. Il y fera la rencontre de l’infâme «Homme Biscornu» et de multiples personnages dangereux comme des hommes-loups et des monstres
sanguinaires. Assez classique comme situation !
Cependant, là où j’ai eu le plus de plaisir, ce sont les moments où l’auteur se paie le plaisir de métamorphoser les contes de son enfance: le Petit Chaperon rouge provoquant une relation
spéciale avec le loup, Blanche-Neige en patronne tortionnaire obèse, vivant aux crochets des Sept Nains, syndiqués, revendicateurs ... et maltraités ... psychologiquement, Hansel et Gretel et la
méchante sorcière, etc. De petits moments de pur plaisir pour qui sait apprécier l’ironie.
Alors, comme lecteur, il faut jouer le jeu, s’amuser avec l’auteur qui nous y invite et se laisser porter par l’histoire, par le merveilleux, par le fantastique. Bref, retrouver nos yeux
d’enfants en train de lire, sous les couvertures avec une lampe de poche. Avec la peur ... de se faire prendre !
Évidemment, certains diront que pour le vrai lecteur adolescent, ce livre est trop violent et que le jeune héros tue, sans peur et sans reproche ... comme dans les jeux vidéos auxquels ce
livre pourrait les arracher ... C’est une question qui m’a toujours turlupiné ... Comment se fait-il que la violence des jeux vidéos et de la télévision est toujours mieux acceptée que celle
décrite dans les livres, dans la littérature ? J’aurais besoin d’avis d’experts ! Ou d’une explication d’amateurs avertis !
J’ai aussi apprécié certains passages où l’auteur fait l’apologie des histoires et de la lecture ...
«Les histoires veulent être lues, disait la mère de David dans un murmure. Elles en ont besoin. C’est pour cette raison qu’elles quittent leur monde pour se
frayer un chemin jusqu’au nôtre. Elles veulent qu’on leur donne vie.»
Et un des passages les plus drôles où l’auteur nous présente les discussions des Sept Nains où « ... il était beaucoup question de «la nécessité pour les
travailleurs de détenir leurs propres moyens de production» et des «principes du Second Congrès de la Troisième Commission» qui apparemment s’était terminé par une violente querelle pour savoir
qui allait faire la vaisselle.»
Finalement, ce livre m’a quand même beaucoup ému et certainement, il a été fort distrayant car il nous transporte de moments de violence en moments tendres à souhait. Malgré une fable mille fois
racontée, il faut être complice avec l’auteur et se laisser raconter une histoire, joliment tournée, qui se termine dans une fin tout à fait charmante.
Un livre à lire, oui ! Mais avec des attentes réalistes et un coeur d’enfant ! Alors, pour ceux qui seraient tentés par ce livre, allez chercher votre lampe de poche, installez-vous sous les
couvertures et profitez d’un petit plaisir de lecture.
Bonne lecture !
Le Livre des choses perdues
John Connolly
J’ai lu 2010
377 pages