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14 Mars 2012
J’aime beaucoup Dominique Manotti et DOA. Et de voir leurs noms réunis sur une même jaquette de roman dans la Série Noire de Gallimard a grandement excité ma curiosité livresque et polardienne. Quelle explosion sociale, politique et économique nous réservait «L’honorable société» ? Quel combat, quelle bataille serait menée sur papier pour nous divertir mais surtout pour nous sensibiliser ?
Dominique Manotti et DOA nous livrent donc un roman à leur mesure, alliant un suspense prenant (pas haletant !) inoculé à la sauce économico-politique. L’intrigue est bien menée, solide et le lecteur accroche graduellement au jeu des acteurs du drame. Page par page, on apprend à connaître les personnages, leur rôle dans le récit et les pièces du casse-tête en trois dimensions s’emboîtent peu à peu.
Nous sommes en pleine période électorale française. L’action se passe entre les deux tours des élections présidentielles. Benoit Soubise, un employé de la sécurité du Commissariat à l’énergie atomique, surprend deux hommes en train de copier le disque dur de son ordinateur. Pris de court, les deux hommes paniquent. Ils tuent Soubise.
Pendant ce temps, quelque part à Paris, des activistes écologistes piratent l’ordinateur de Soubise, prennent le contrôle de sa caméra et assistent, impuissants, à ce meurtre en direct. Ayant prévu une action d’éclat lors de la soirée du débat électoral à la télévision, les voici pris dans une histoire tortueuse et dangereuse où tous les coups sont permis ... même au détriment de la vie.
Les auteurs nous dépeignent un monde politique et économique prêt à tout pour garder «LE» pouvoir. Corruptions, meurtres, collusions, trahisons, tout est permis pour arriver à ses fins. Les objectifs politiques, les promesses d’avenir et surtout le bien du peuple, tout cela est de la poudre aux yeux pour cacher le véritable agenda: pouvoir et argent !
Manotti et DOA nous tracent un portrait à vif, équarri à la hache ébréchée, d’une classe politique qui ne pense qu’à ses poches, en fouillant dans celles des autres. Je ne connais pas assez les moeurs politiques françaises pour me permettre de juger d’une possible vraisemblance de cette histoire mais, si je jette un coup d’oeil à ce qui se passe au Québec, probablement que certains des événements de ce récit pourraient refléter une certaine réalité.
J’étais également curieux de voir comment l’écriture pouvait se manifester, dans ce roman écrit à quatre mains, par deux auteurs reconnus, étant habitués à prendre toute la place sur la page de leur livre. Et bien, je ne peux que faire ce compliment: jamais, je ne me suis rendu compte de l’influence de l’un ou de l’autre, ni dans le style, ni dans l’écriture.
Un seul bémol, que je fais souvent en lisant les romans de DOA, l’utilisation abusive des acronymes ... Le saupoudrage de CEA, PRG, RTL, EDF, SFR, SISS, RG, STIC, DCRG, IJ, BRI et autres SFP ... tout en y ajoutant les CD, CD-ROM et les clés USB qui pimentent l’histoire m’indispose vraiment! Peut-être suis-je un peu grognon mais cette pluie d’acronymes a eu raison du parapluie de mon indifférence.
Cependant, que cela ne vous empêche pas de lire ce très bon roman qui vous fera passer un excellent moment de lecture.
Je vous souhaite une bonne lecture et nous souhaite des politiciens réellement préoccupés de notre bien-être ... et pas juste de notre bien.
Pas d’extrait ? Et non et c’est bon signe ! Pris par l’histoire, j’ai oublié d’utiliser mon surligneur. Il y a sûrement quelques phrases qui auraient mérité d’être citées ... mais dans ce genre de romans, on s’attache plus au développement de l’intrigue. Mais je ne peux faire autrement que de vous laisser avec l’épigraphe choisi par les romanciers pour illustrer les sentiments que devraient provoquer le récit:
« Toute classe qui aspire à la domination doit conquérir d’abord le pouvoir politique pour représenter à son tour son intérêt propre comme étant l’intérêt général.»
KARL MARX
L’idéologie allemande
Bonne lecture !
L’honorable société
Manotti et DOA
Série Noire Gallimard
2011
329 pages
Une entrevue fort intéressante sur Libération.