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26 Septembre 2010
Il n’est jamais trop tard pour bien faire ! Mais ne vous laissez pas berner ni par le titre ni par la 4e de couverture !
«Dérive sanglante»: j’avais lu beaucoup de belles choses sur ce roman qui par son titre, annonçait un festival de sang et
d’horreurs.
Et la 4e de couverture qui disait: «Calhoun ... accumule les découvertes macabres ...» « ... un final aussi violent qu’étonnant.»
Et bien, il n’en n’est rien ! Ce roman est excellent ! Il aurait mérité un titre plus approprié et aussi que le rédacteur de la 4e de couverture ... au lieu de nous
sortir des phrases de marketing inutiles et surtout mensongères (a-t-il lu le livre?), aurait pu juste nous vanter les nombreuses qualités littéraires de ce roman ! Ce livre n’avait pas besoin de
cette «dérive publicitaire» !
Bon, passons outre ces éléments secondaires mais un peu dérangeants pour parler d’un excellent roman.
L’histoire: Stoney Calhoun est un homme sans passé. Il est arrivé, il y a cinq ans, dans ce petit village du Maine, il s’y est établi et y vit une petite vie
tranquille, travaillant dans une boutique d’articles de pêche, fabriquant des mouches et servant de guide pour des excursions de pêche. Sa patronne, Kate, «une femme à la beauté
spectaculaire», est aussi sa maîtresse, sous le regard approbateur de son mari handicapé.
Juste avant son arrivée, Stoney a été victime de la foudre, ce qui l’a rendu amnésique. Il s'est installé dans ce village, porté par un quelconque instinct. Il a
reçu un chèque de 25 000$ et à chaque mois, il reçoit un montant d’argent, dans son compte de banque. De la part de qui ? Pourquoi ? Il ne le sait pas ... et nous non plus. Mais on se doute que «
Quelqu’un avait de sacrées obligations envers lui.»
Un bon matin, un client se présente à la boutique et veut un guide pour une excursion de pêche. Malgré que ce soit à son tour d’y aller, Stoney demande à Lyle d’y
aller à sa place. Lyle ne reviendra jamais; on le retrouve, assassiné, dans un petit étang de la forêt.
Commence alors une enquête où Stoney Calhoun se découvre des habiletés de policier, des compétences oubliées d’un passé enfoui au fond de son
inconscient.
Je vous avertis tout de suite, tous et toutes, vous allez adorer ce personnage ! Il a tout pour plaire aux amateurs de polars: un passé troublant à découvrir, des
fréquentations mystérieuses, du succès auprès des femmes, un côté humain très développé, une intelligence vive, un sens de l’observation assez troublant et une sensibilité à fleur de peau. Il est
un ami fidèle et généreux, son intolérance à l’alcool en fait un amateur de Coca et son respect de la nature cadre très bien dans l’atmosphère ce petit village. Et en plus, Calhoun est un bon
lecteur ... d’un seul livre: une anthologie de la littérature américaine de 2 000 pages.
Ne vous attendez pas à une histoire haletante et avec des rebondissements à chaque page. Non, ce n’est pas le genre de la maison. William G. Tapply tisse patiemment
sa toile en nous révélant graduellement les détails et indices qui nous amèneront à la résolution de l’enquête. Les personnages sont attachants, bien campés; dès le début, dans des
descriptions simples et concises, le lecteur les reconnaît et peut suivre l’intrigue sans détour ni méandre. On adore le personnage de Kate dans toute sa splendeur ... et son honnêteté. On
fréquente avec plaisir le sympathique shérif Dickman; on profite de l’accueil chaleureux des Ross ... et on s’habitue à la présence presqu’humaine de Ralph, le chien perspicace de
Stoney.
Le style est chirurgical, précis, sans fioriture mais tellement efficace. La lecture du roman coule comme un ruisseau au printemps dans les forêts du Maine ! Les
dialogues sont percutants et souvent teintés d’humour.
«- Tu raisonnes vraiment comme un flic, Stoney.
J’ai l’esprit tordu, c’est tout.»
« Il se pencha et gratta le museau de Ralph.
- Bon boulot, chuchota-t-il. T’as l’ouïe et l’odorat. J’ai l’oeil et le fusil. À nous deux on fait un vrai prédateur.»
De plus, j’avoue que l’intrigue parallèle du dévoilement progressif de la vie antérieure de Calhoun, la présence inquiétante de «l’Homme au
Costume» et la découverte des talents acquis dans son autre vie, tous ces éléments enrichissent grandement l’intrigue de base du roman et nous invitent fortement à continuer, dans les
prochains romans, notre découverte du passé caché du personnage principal.
Je vous recommande grandement la lecture de ce roman. Amateur de romans noirs mais aussi de romans policiers plus «doux», amateur de pêche ou simple bon lecteur,
vous y trouverez une bien bonne histoire, bien racontée et un personnage qu’on aimera sûrement suivre dans ses prochaines aventures. En ce qui me concerne, je me propose de lire, très
prochainement, les deux romans qui constituent la suite de «Dérive sanglante» ...
«Casco Bay» chez Gallmeister publié en 2008
et
«Dark Tiger», aussi chez Gallmeister, en 2010.
Voici quelques extraits reflétant le style de William G. Tapply:
«C’était comme ça dans la région. Les gens braconnaient, trompaient leur femme, trichaient sur leur feuille d’impôts et conduisaient bourrés. De temps à
autre, ils se tiraient dessus, très bien. Mais les habitants du Maine, bon Dieu, ils respectaient la propriété privée ! Jamais personne ne s’était introduit chez lui.»
«Ça joue les durs à cuire pour faire oublier qu’en vérité, c’est un vieux con au coeur tendre.»
«Pas de terre fraîchement remuée. Pas de pied sortant du sol.
Juste les bois, dont les vieilles feuilles brunies tapissaient la terre, là où elles étaient doucement tombées huit mois plus tôt.»
Bonne lecture !
Dérive sanglante
William G. Tapply
Gallmeister
2007
268 pages
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