13 Novembre 2022
Retrouver le pays oublié
Une chronique de Christophe Rodriguez
Selon ses humeurs, Ian Mannok de son vrai nom Patrick Manoukian signe des polars. Que ce soit en Mongolie avec son héros au nom imprononçable Yeruldegger ou beaucoup plus violents sous la plume de Roy Braverman. Depuis l’année dernière, ce fils d’Arménien a entrepris de nous raconter l’histoire de sa famille. Exilée, puisqu’elle a vécu le génocide arménien de 1915, l’Oiseau bleu d’Erzeroum ouvrait la porte à une saga plus que touchante, historiquement vraie qui fut saluée et à juste par la critique et les lecteurs, évidemment. Nous sommes en 1947 et le monde se voit plongé dans une guerre froide qui oppose l’esprit capitaliste à la vulgate rouge, version du dictateur sanglant Staline. Pour attirer le simple citoyen, il vante la beauté du paysage soviétique, le plein emploi, bref le paradis sur terre qui va sous peu devenir un enfer pour plusieurs.
Tel Agop qui part sur un bateau du moins luxuriant pour rejoindre sa terre d’Arménie qui s’avérera un mirage. Nous retrouvons Haïganouch, la petite sœur de la grand-mère qui dans le fin fond de la Sibérie lutte désespérément contre les commissaires communistes, Laventi Beria en tête, psychopathe parmi les bourreaux.
Dans cette suite, Ian Manook révèle ses talents de conteurs, tout en nous décrivant le grand mensonge soviétique. Lieu de terreur et de famine où les passeports sont confisqués aux premiers arrivants, peu échapperont à ce terreau de Caïn. Remarquables de justesse, poétiques souvent, que les personnages sont attachants! L’auteur nous a envoûtés une fois de plus. Et quelle leçon d’histoire. Bien avant Twitter et autres complotistes, Staline et ses sbires avaient tout compris mettant en place une machine bien huilée qui broyé la résistance ou ceux qui osaient penser différemment. Un cadeau qui s’impose !
Bonne lecture !
Le chant d’Haïganouch
Ian Manook
Éditions Albin Michel
380 pages
Un homme et un écrivain que j'admire ! J'ai la chance de le connaitre, d'être son ami et de vous dire qu'on doit lire Ian Manook, ses polars et cette saga arménienne.(Richard)