10 Avril 2022
Pas de miracles
Une chronique de Christophe Rodriguez
Pour employer une expression toute québécoise : « Accrochez votre tuque avec de la broche». Depuis trois semaines, avec certes quelques dérapages dans le lot de nouveautés qui afflue en cette saison printanière, je suis plongé dans cet énorme polar, on ne peut plus réaliste.
Proche des romanciers irlandais, sans aller jusqu’à James Ellroy comme nous pouvons le lire en quatrième de couverture, l’auteur Benjamin Dierstrein a bien appris du roman noir français des années 70-80. Cooptant des faits tangibles : triomphe politique de la gauche juin 2012, chute de l’empire Sarkozy, remue-ménage dans les rangs du 36 Quai des Orfèvres), il oppose au jeu politique, deux flics de carrière en perdition.
La commandante Laurence Verhaegen, tête dure, quitte la DCRI pour la brigade criminelle de Paris avec un mandat politique assez louche. Séparée de sa fille, elle espère mieux, mais ni son temps ni l’argent ne peuvent la sauver d’un naufrage familial. Elle va retrouver son ancien collègue Gabriel Prigent. Hanté par la disparition de sa fille il y a six ans et remis d’une grave blessure, il sombre lentement, mais reste un très bon policier, limier tenace.
À peine arrivés sur le terrain, ils sont confrontés à une terrible histoire. Un lointain cadre politique s’enlève la vie, après avoir tué sa femme et son petit garçon. Mélangeant politique, ainsi que le scandale, cet homicide va déboucher sur des réseaux occultes, avec des pédocriminelles qui trouvent leurs victimes, dans les cités et les déshérités de notre société.
En plus de 800 pages, nous nageons dans l’enquête, les descriptions en certains cas scabreuses qui sont, hélas, le lot d’une réalité trop courante. Comme le fit à une époque, les écrivains Joseph Wanbaugh et Ed Mac Bain, sans oublier Olivier Norek, c’est la vie de policiers qui est exposée. À la sortie de ce roman qui se lit parfois comme un compte rendu judiciaire, l’espèce humaine en prend pour son grade, sans jeux de mots. Puissant!
Bonne lecture !
La cour des mirages
Benjamin Dierstein
Équinoxe /Les arènes
840 pages
La Cour des mirages - les arènes
Juin 2012. Triomphe politique pour la gauche et gueule de bois pour la droite. Les têtes tombent. Les purges anti-sarkozystes au sein du ministère de l'Intérieur commencent. La commandante Laurence