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Polar, noir et blanc

Un blogue qui parle de livres, de bons livres, dans tous les genres, juste pour le plaisir de lire et d'en parler.

On meurt tous d’avoir vécu

Une chronique de Richard

J’ai d’abord pensé à « déjanté » puis, en cherchant dans le dictionnaire, je me suis rendu compte que la description ressemblait vraiment à ma lecture de ce premier roman de Karine Vilder, « un peu fou ». Mais par souci de justesse, à la recherche du mot précis, j’ai consulté mon précieux Druide pour trouver « farfelu », « givré » comme dirait mes amis.es français.es et encore, en plus québécois, « capoté » ! Voilà tous les mots qui me viennent à l’esprit après ma lecture de « On meurt tous d’avoir vécu » de Karine Vilder.

Louky Crapo ( hé oui, ça commence bien avec ce nom très rigolo) est journaliste dans une agence de presse. Depuis vingt ans, il rédige des avis de décès. Puis, il obtient enfin le poste qu’il recherche, responsable du département de Nécrologie où la tâche principale consiste à rédiger des textes racontant la vie de certains personnages célèbres. Avant qu’ils meurent ! Pour être prêt, le jour où ils passent l’arme ( ou larmes ...) à gauche. Voici ce qu’on appelle dans le jargon journalistique, une viande froide. Et ça existe vraiment !!

Surveiller la maladie de ces vedettes, voir le degré de dangerosité dans leurs actions, être à l’affut du moindre indice, tous les sens de nos chroniqueurs mortuaires (et mortifères ... ben oui !!!) sont aux aguets. La mort n’avertit pas, mais leur travail, c’est de la devancer. Parce que « bâtir sa carrière sur un monticule de cadavres n’a rien de folichon » !

Notre journaliste nécrologue se rend compte, un jour, qu’il possède un certain pouvoir, une compétence qui pourrait lui servir dans la réalisation de ses objectifs de vie. Rendre le monde un peu meilleur en le privant de certains éléments malintentionnés.

Deux événements viendront provoquer un changement dans la vie de notre chroniqueur.

Premièrement, l’ouverture d’un dossier particulier dans son ordinateur qu’il nomme « Boîte de Pandore » et dans lequel il écrit une « viande froide » sur la directrice des ressources humaines qui l’a mis en congé forcé. Il prévoit que la DRH mourra étouffée par un morceau de viande. Ce qui arrivera quelques jours plus tard, à la grande surprise de Crapo !

Deuxièmement, notre écrivain de la mort, découvre les Darwin Awards, des prix qui « récompensent » les personnes qui se tuent de façon idiote, débile, au-delà de l’entendement d’une personne le moindrement intelligente. Exemples : un homme qui lance un bâton de dynamite allumé et dont le chien s’empresse de lui rapporter. Un terroriste qui affranchit insuffisamment sa lettre piégée et qui l’ouvre quand on la retourne à l’expéditeur.

Et voilà que dans le cerveau de notre vilain Crapo, émerge l’idée de débarrasser la terre des personnes qui pourraient envisager une tuerie de masse en se servant de l’écriture de « viande froide » de ces « probables futurs tueurs » en leur trouvant une mort ... très créative. Et déjantée ! (Voilà, on y est revenu !!!)

Mais c’est sans compter un astucieux policier se rendant compte que cette série de morts bizarres cache peut-être un lien !

Soyez rassurés, la fin est à l’image du roman; aussi folle et drôle !

« On meurt tous d’avoir vécu » est un antidote efficace contre la morosité du moment (qui dure depuis un peu trop longtemps !!!). Lire ce roman, c’est avoir un sourire permanent dans la figure qui ne s’efface qu’au moment où le lecteur se met à rire ! Remède efficace, vaccin anti-déprime, le livre devrait faire partie de la liste de médicaments remboursés par l’Assurance maladie.

On découvre dans ce texte une auteure au style exubérant, une écriture imaginative et une culture impressionnante. Karine Vilder nous offre un moment de lecture qui fait du bien, mais en même temps, comme lecteur, on y découvre un talent d’autrice capable de sortir des sentiers battus et d’y rester pour créer d’autres voies (et d'autres voix). Bien différentes. La route du polar comique n’est pas un chemin très fréquenté au Québec. Malheureusement !

Ce roman est rigolo même si on y voit la noirceur de notre monde actuel. Y jeter un regard frivole, de temps en temps, ça peut faire du bien !

Et moi, j’ai bien hâte au prochain roman de cette nouvelle écrivaine ... en espérant qu’elle restera dans cette veine, d’écrire des histoires qui font du bien !

Deux extraits pour voir le style ... :

Pour un rédacteur de « viande froide » ... quelle frustration! : « Chaque fois qu’on m’interroge sur mon travail, ce « on », quel qu’il soit, finit presque toujours par lâcher un ah bon poli avant de poser, au choix, l’une des trois questions suivantes : dans quelle boucherie ? Au comptoir de quel supermarché ? Ou, celle que je préfère : dans quel abattoir ? »

« L’humour est souvent une arme à double tranchant et, manié au mauvais moment ou au mauvais endroit, le résultat ne sera pas toujours drôle pour tout le monde. Au fil des ans, j'ai ainsi dû supprimer de mon lexique de locutions « à mourir de rire », « muet comme une tombe », « blanc comme un cadavre », « silence de mort », « rester de marbre » et « faire une croix sur ».

Bonne lecture !

 

On meurt tous d’avoir vécu

Karine Vilder

Éditions Stanké

2022

218 pages

 

 

 

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