20 Mars 2015
Anna-Raymonde Gazaille est une nouvelle venue dans le monde du polar québécois. Après un premier roman, « Traces », fort bien réussi, elle nous revient avec « Déni », un excellent roman qui jongle avec une thématique complexe et controversée : le fanatisme religieux, les accommodements raisonnables et les crimes d’honneur.
Le drame s’installe dans un quartier tranquille de la ville de Montréal, Parc-Extension, où vit une communauté importante de Pakistanais. Une jeune fille de 15 ans est retrouvée, pendue par son hijab, au tremplin de la piscine du quartier. Suicide ? Meurtre ? Le mystère est entier.
Appuyée par Josée Fortier, détective au poste 33, l’équipe de l’inspecteur Paul Morel, se voit confier l’enquête. Se heurtant au silence des habitants du quartier, qui se méfient de la police et qui s’opposent aux enquêteurs. Le choc des cultures crée un fossé entre les enquêteurs et la communauté du quartier. Rien n’est simple, tout se complique ! L’opacité la plus totale enrobe l’enquête.
Puis, la liste des suspects s’allonge, quand d’autres meurtres surviennent et élargissent le spectre des coupables présumés. En plus de la possibilité d’un crime d’honneur ou d’une vengeance amoureuse, la prostitution, les guerres de gang et la pègre locale viennent complexifier l’enquête. La lecture devient alors passionnante !
Anna-Raymonde Gazaille construit une trame romanesque complexe, structurée, qui met en valeur une galerie de personnages crédibles, attachants pour certains et parfaitement détestables pour d’autres. De plus, ce deuxième roman met en scène un très beau personnage, mystérieux, qui au fur et à mesure du récit, nous révèle une personnalité riche, une histoire fascinante et un regard pénétrant sur la situation. Anya est vraiment un personnage central important dans le développement de l’histoire et l’auteure a su l’intégrer d’une façon assez originale … pour qu’elle devienne une raison majeure d’aimer ce roman.
Ce roman n’a pas dû être facile à écrire. L’auteure, comme une funambule sur son fil de fer, a pu garder son équilibre au-dessus du vide qui aurait pu l’aspirer et la faire tomber dans les clichés faciles. Anna-Raymonde Gazaille traite ces sujets avec justesse et beaucoup de sensibilité. Elle nous trace (je voulais la placer celle-là …) un portrait fidèle, sans jugement facile, sur les problèmes d’intégration de certaines communautés.
Je vous invite donc à découvrir cette auteure qui mérite grandement le détour. Ce deuxième roman confirme le talent que l’on soupçonnait dans son premier récit. N’hésitez pas à faire cette découverte !
« Une bouffée de colère lui étreint la poitrine. Le ventre des femmes serait encore un frein, une embûche à leur affranchissement ?
Des millions d’entre elles subissaient le déni, sous couvert de religion, de culture. »
Bonne lecture !
Déni
Anna-Raymonde Gazaille
Leméac
2014
290 pages
Anna Raymonde Gazaille | Écrivains - Leméac Éditeurs
Anna Raymonde Gazaille a travaillé dans le milieu des arts de la scène en tant que gestionnaire d'organismes culturels. Elle a été, entre autres, directrice générale de la compagnie Montréal...
http://www.lemeac.com/auteurs/158-anna-raymonde-gazaille.html
La page de l'auteure sur le site de sa maison d'édition
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