11 Septembre 2014
« Le mal ne vit pas par lui-même … » dixit André, page 103.
« Écrire le mal »
Une couverture épurée où le mal prend toute la place.
En noir et blanc ! Comme si le mal mesurait tout l’espace à conquérir.
Une touche de rouge comme une tache de sang … qui s’étire, s’allonge et se traîne !
Un premier roman pour adultes de Claude Champagne, un roman noir, très noir ; assez pour qu’on se demande ce qu’il a pu écrire en littérature jeunesse !
Un premier polar qui annonce un talent certain vers une série de thrillers psychologiques à faire trembler d’effroi ses lecteurs.
Un premier roman policier où le criminel étale sans retenue toute l’essence du mal qui le possède, sans possibilités d’exorcisme ou de rémission.
Un premier thriller, signe avant-coureur d’un talent indéniable et d’une plume acérée comme un couteau tranchant.
Jean Royer est un écrivain, un dramaturge et un poète. Cependant, il n’a rien écrit depuis six ans, depuis le jour où sa fille a disparu. Sa belle adolescente de 15 ans s’est évanouie dans la nature. Une fugue ? Sûrement pas. Un enlèvement ? Probablement. Est-elle vivante ? Mystère !
Propriétaire d’une agence de détectives, le père de Jean Royer vient de mourir. Il lègue à son fils son agence où travaillent deux détectives, Fernand Levasseur et Roger Leduc, complices et amis de son père, depuis toujours.
N’étant aucunement intéressé par le travail de « privé », Jean se rend au bureau de son paternel décédé, pour annoncer aux deux détectives, son intention de vendre l’agence mais d’inclure une clause garantissant leur lien d’emploi.
Avant même de faire son annonce, une vielle dame entre et demande de l’aide pour retrouver l’assassin de son chien. En pleurs, la vieille raconte la découverte de son animal préféré, crucifié sur un arbre dans un petit bois près de chez elle. Curiosité d’écrivain oblige, Jean se rend dans la forêt et découvre un véritable carnage, des animaux cloués sur le tronc des arbres, le ventre ouvert de coups de couteau avec acharnement et de férocité. Qui sont les personnes qui ont créé ce « camp de vacances pour futurs tueurs en série » … ?
Se mettant graduellement le doigt dans l’engrenage, l’auteur se transforme petit à petit en enquêteur. Cependant, il n’oublie pas son métier d’auteur et il reprend la plume pour écrire le journal de cette enquête.
Puis, certains signes tendent à relier les événements actuels avec la disparition de sa fille. Sa motivation s’accroit alors et il n’hésite pas à marcher dans les plates-bandes des services de police pour résoudre cette affaire et ainsi, savoir ce qui est arrivé à sa fille. Il sera aidé et conseillé par un policier à la retraite de la brigade canine qui, lui aussi, a vu son chien épinglé cruellement à un arbre.
Tout est donc en place pour entrer dans un récit tricoté serré, ponctué de rebondissements et entrecoupé par la lecture du journal d’un jeune ado à la découverte du mal et des rapports écrits par le père de Jean Royer sur l’affaire de la disparition de la belle Charlotte. À mon avis, le journal de l’ado m’apparaît comme les moments forts de ce roman. J’ai adoré ces chapitres.
Claude Champagne réussit, ici, un très bon roman avec tous les ingrédients pour plaire aux amateurs du genre : une bonne enquête (plutôt deux ou trois…), des personnages complexes, un regard acerbe sur notre société et une tension qui nous agrippe de plus en plus.
Comme sur la page couverture, l’auteur réussit à prendre le mal, à le décliner à plusieurs temps et à en faire un portrait assez juste, de sa naissance jusqu’au moment ultime où la source de mort jaillit … en rouge ! Dans un style équarri au couteau tranchant, l’auteur réussit à rendre les niveaux de langage de chaque personnage et à les rendre crédibles et cohérents.
Un dernier commentaire ! Que j’ai aimé la dernière scène … preuve frappante que les auteurs de romans noirs possèdent une sensibilité qui essaie toujours de se dissimuler derrière la violence de leurs récits.
« En fait, c’est l’écrivain en moi qui souhaitait s’y rendre, comme si ce charognard n’en avait jamais assez de se nourrir du malheur des autres. »
« Le mal ne vit pas par lui-même, qu’il dit. Celui qui l’a doit le chérir, le faire grandir, en prendre soin. Et le transmettre. Comme un cadeau. Non, plus que ça. Une offrande. Les victimes sont pas importantes. En fait, y a pas de victimes. C’est juste des instruments vers la réalisation. »
« Maudit que c’est pas facile de marcher avec son cerveau quand son cœur fait du bruit. »
« Mon père est mort depuis plusieurs années mais c’est à peine s’il a été vivant. »
Bonne lecture !
Écrire le mal
Claude Champagne
Éditions Druide
2014
268 pages
Le site personnel de l'auteur
Le Pigeon décoiffé: Entrevue avec Claude Champagne
"Un écrivain qui rêve est un écrivain qui travaille" - Claude Champagne La grande question : pourquoi écrivez-vous? Parce que je sais rien faire d'autre? À quel moment avez-vous commencé à ...
http://www.lepigeondecoiffe.com/2014/07/entrevue-avec-claude-champagne.html
Pour mieux connaitre Claude Champagne, une entrevue de Nadia Gosselin dans "Le Pigeon décoiffé"
CLAUDE CHAMPAGNE, Écrire le mal - Roman - Éditions Druide
Écrire le mal, c'est le journal intime d'une enquête sur le mal. C'est un polar psychologique aux accents de thriller qui met en scène un écrivain dans une agence de détectives privés, des an...
http://editionsdruide.com/livres/automne-2014/ecrire-le-mal/
Sur le site de son éditeur