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Polar, noir et blanc

Un blogue qui parle de livres, de bons livres, dans tous les genres, juste pour le plaisir de lire et d'en parler.

"Le Duel" d'Arnaldur Indridason

"Le Duel" d'Arnaldur Indridason

Je ne m’en cache pas, Arnaldur Indridason est un de ces auteurs que j’apprécie beaucoup. Même si j’adore les thrillers et les romans époustouflants de rebondissements et d’action, le rythme lent des romans de l’auteur islandais, les passages réflexifs qui truffent l’intrigue et la découverte de ce pays si fascinant, ne sont pas pour me déplaire. Au contraire !

« Le Duel » prend pour cadre le fameux match d’échecs entre le Russe Boris Spassky et l’Américain Bobby Fischer. La ville et ses habitants sont fébriles ; Reykjavik devient le centre du monde, pour quelques temps. Le comportement d’enfant gâté de la star américaine, les tribulations des communistes islandais en pamoison devant le Russe, tout cela situé dans l’atmosphère de guerre froide des années 70, prennent toute la place dans les journaux de la capitale.

Pendant ce temps, la vie continue … mais parfois, aussi, elle s’achève cruellement. Trop rapidement ! Un tout jeune homme, sans histoire, un peu benêt, grand amateur de films, est assassiné dans une salle de cinéma. Il avait une drôle d’habitude : il collectionnait les trames sonores des films qu’il visionnait.

Le commissaire Marion Briem se voit confier l’enquête. Au fur et à mesure de la progression de l’enquête, nous découvrirons l’histoire de ce commissaire, de son enfance hantée par la tuberculose, de ses séjours en sanatorium et l’évolution des traitements, parfois assez violents, de cette maladie. Découverte ! On s’attache à ce personnage énigmatique (comme pour bien des personnages d’Indridason), à son humanisme et à sa générosité. L’auteur nous dépeint cet homme complexe avec profondeur, une sensibilité qui nous rend ce personnage tellement sympathique, tellement riche. Le commissaire Briem est un personnage très attachant.

Mais aussi, très très énigmatique ! Arnaldur Indridason joue un jeu avec ses lecteurs, un clin d’œil, qui, je l’avoue, m’a complètement berné. Tout au long de ma lecture, j’ai pensé que Marion Briem était un personnage masculin. Volontairement, j’imagine, nulle part dans le texte, l’auteur utilise les pronoms il ou elle. Puis, à la suggestion d’un blogueur, je suis retourné dans " La cité des jarres " où l’auteur précise le genre féminin de Marion, très clairement ! Je me suis donc laissé avoir … Bravo monsieur l’auteur ! Et shame on me … pour ma mémoire !

L’intrigue est passionnante et surtout, tout y est parfaitement équilibré. L’auteur nous plonge dans des univers différents, nous immerge dans les contradictions entre l’enfance de l’inspecteur, la vie simple de la victime et le milieu bourgeois des grands maîtres des échecs. Cette enquête qui apparaît toute simple au début, se transforme graduellement en une complexe histoire d’espionnage, au détriment de ce pauvre adolescent assassiné.

Évidemment, le lecteur retrouvera le style d’Indridason qui nous transporte dans une lecture toute en nuances et en émotions. Les drames sont nombreux mais l’humour vient souvent édulcorer l’atmosphère. Et comme dans une thématique récurrente de l’auteur islandais, le passé remonte à la surface, hante l’esprit des personnages et colore le présent des couleurs sombres et tristes du passé.

Puis, comme un message d’espoir, à la dernière page de ce roman, un jeune policier apparaît. Marion le regarde, un visage intelligent, une bouche volontaire mais des yeux cernés, profondément. Il tient une enveloppe tout en se grattant le cou. À la demande de Marion, il dit son nom : « Je m’appelle Erlendur Sveinsson. »

Quelques extraits :

« Ses petites épaules s’étaient affaissées en un soupir à peine audible, ses bras étaient retombés le long de son corps. Immobile, Marion regardait les plis du drap blanc et s’imaginait que, volant au-dessus des montagnes de Snaefjöll, son ami rentait chez lui. »

« Il est plus facile de croire en Dieu quand on sait qu’il n’existe pas. »

« Encore épuisée, elle était à peine parvenue à sourire en voyant Marion apparaître à la porte. Une joie presque invisible avait toutefois illuminé ses traits. »

Bonne lecture !

Le Duel

Arnaldur Indridason

Métailié

2014

309 pages

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V
Bonsoir,<br /> Juste une remarque. Assez ahurissant de la part d’un écrivain de sa renommée : Au début du livre il évoque le film « la prisonnière du désert » avec Grégory Peck. Or, c’est John Wayne qui tient le rôle et non Grégory Peck. Une erreur aussi grossière, quelque chose m'échappe...
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C
Je viens de terminer ce livre, et comme bon nombre de lecteurs, je me suis demandée si Marion était un homme ou une femme. J'avais des souvenirs de lecture des précédents romans, mais ne me rappelais plus trop si l’ambiguïté avait été levée. Bref, ça me titillait pas mal !! Finalement, je suis allée à la pêche, non pas au saumon, mais aux informations auprès d'amis d'amis qui avaient des amis vivant là-haut dans le grand Nord. Et ô surprise, il s'est avéré que dans la version originale, le doute n'est jamais levé, Indridason jouant habilement sur les formes de ses phrases pour ne jamais, jamais dire le fin mot de l'histoire ! Exercice qu'il connaît bien puisque &quot;Betty&quot; l'illustre parfaitement. Donc dans &quot;le duel&quot; c'est totalement volontaire. Alors, parti pris des traducteurs, baisse de vigilance lors de la traduction, certaines tournures de phrases dans la version française font tantôt pencher pour une version masculine, ou tantôt une version féminine. Mais le personnage de Marion, dans sa version originale, garde tout son mystère tout au long de la saga. Un personnage aussi crépusculaire que les paysages d'Islande, peut-être ? :-)
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R
Merci Christine,<br /> Je compte sur toi pour dénouer l'affaire !<br /> Bonne recherche !
C
Mais de rien !! Tout le plaisir est pour moi, j'adore jouer les Miss Marple :-)<br /> Au hasard des navigations sur le ouaib, je suis arrivée sur le blog d'un traducteur néerlandais, qui avouait s'être arraché les cheveux pour avoir un texte de la neutralité la plus totale et tenter de rester fidèle à l'auteur.<br /> Si l'occasion se présente lors d'un salon ou festival, ce serait bien de tenter de corrompre Indridason pour qu'il nous glisse la réponse à l'oreille. Et ça restera entièrement entre nous, n'est-ce pas ? ;-)
R
Merci beaucoup Christine pour ces informations fort intéressantes !<br /> Je vois que le débat reste ouvert; je le croyais résolu !<br /> J'adore ce mystère !<br /> Merci encore et au plaisir de lire tes commentaires !
P
Deux phrases du roman permettent de confirmer que Marion Briem est bien une femme : <br /> Chapitre 18 : &quot;Oui, répondit Marion d'un ton sec qui suggérait que tout ce qu'Albert pourrait lui dire sur la tuberculose n'avait pour elle aucun intérêt.&quot;<br /> Chapitre 32, Albert à Marion : &quot;qu'est-ce qui te rend si sûre de toi ?&quot;
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R
Merci Patrick pour ces précisions !
D
Je ne comprends pas moi non plus pourquoi Indridason entretien ici le mystère sur Marion homme ou Marion femme, d'autant plus que dans L'homme du lac et La voix, Marion Briem est belle et bien une femme...
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R
Probablement un petit plaisir ou un défi que l'auteur s'est donné ! Il faudra lui poser la question !<br /> merci !<br /> Bonne lecture
D
Bonjour, ce roman m'a moins passionnée que le dernier &quot;Erlendur&quot; &quot;Etranges rivages&quot; mais c'est très bien quand même avec Marion Briem que l'on aimerait revoir avec les débuts d'Erlendur. Indridason sait rendre ses personnages très attachants. On est presque en famillle. Bonne fin d'après-midi.
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R
Peut-être dans le prochain Indridason ??<br /> Nous verrons !<br /> Amicalement !
S
J'ai écrit un comentaire hier, il n'a pas été accepté ou bien il n'est pas arrivé ?<br /> Pas grave, je demandais juste s'il ne t'était pas venu à l'esprit que Marion soit une femme ? Parce que pour moi, et depuis toujours, c'est une femme ( dans le Duel, Katrin dit : les gens vont jaser &quot;, sous-entendu que deux femmes ensemble font jaser, on est en 1972... )Lire ce post, si ça te dit...http://monromannoiretbienserre.blog.tdg.ch/archive/2014/03/24/arnaldur-indridason-le-duel-la-diagonale-du-fou-254311.html? Et aussi une formidable interview sur l'Express http://www.lexpress.fr/culture/livre/arnaldur-indridason-j-adore-james-bond_1510482.html
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R
Moi, je crois que je ne me suis pas du tout senti influencé par le prénom de Marion, me disant que ça pouvait être un prénom masculin en Islande !<br /> Un autre plaisir de la découverte !!<br /> Bonne journée, Simone !
S
Ah ! En fait, j'ai envie de demander à Eric Boury ( qui tient un très intéressant blog ), mais j'en ai parlé hier avec des copines, et nous avions toutes attribué le genre féminin à Marion... sachant que ce prénom nous influence, nous, français, alors qu'il peut être masculin dans d'autres lieux. Enfin oui, Marion est une femme<br /> A bientôt !
R
Bonjour Simone,<br /> Tes commentaires me sont parvenus juste aujourd'hui. J'imagine qu'Overblog avait des difficultés. Je m'excuse !<br /> Merci pour l'information ! <br /> Je me suis questionné sur Marion mais en retournant à mes notes sur les premiers romans d'Indridason, je me suis bien rendu compte (ma mémoire faiblit ...) que oui, sans aucun doute, Marion est une femme. <br /> Je vais aller voir l'entrevue et le blogue avec plaisir.<br /> Merci et au plaisir de te lire.
S
Alors voilà : est-ce que Marion ne serait pas plutôt une femme ? Oui, parce que quand elle retrouve Katrin et qu'un baiser est échangé, Katrin dit : &quot;Les gens pourraient jaser&quot; Pourquoi les gens jaseraient-ils, pour un couple hétéro ? Et Indridason évite soigneusement ( comme dans Betty&quot; que pour ma part j'ai adoré ) d'utiliser un vocabulaire sexué...J'ai lu cette hypothèse sur un autre blog ( http://monromannoiretbienserre.blog.tdg.ch/archive/2014/03/24/arnaldur-indridason-le-duel-la-diagonale-du-fou-254311.html ) et en fait, dans mon esprit, Marion était déjà une femme ! Sans doute à cause du prénom, féminin chez nous, mais aussi à cause de sa personnalité.<br /> Qu'en penses-tu ?
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A
Je me suis un peu lassée d'Erlendur. Mais le dernier lu &quot;Betty&quot; était extra !
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R
Alors, un retour est toujours possible !!<br /> Bonne lecture, Alex !